mardi 8 décembre 2015

Anselm Kiefer - l'alchimie du livre (exposition BNF) - Impressions

Fragments d'un carnet,

Lorsque je me retrouve face à une œuvre d’Anselm Kiefer, je suis dans la conscience d’une transcendance éveillée que les limites de la pensée m’empêchent de clarifier, de nommer.

Je demeure dans la puissance d’une présence. Simple force d’une rencontre à accepter comme telle.

Pénétrer le monde d’Anselm Kiefer, c’est pousser la porte d’un livre que je n’ai pas encore écrit et dont son œuvre m’en révèle le tracé. Il touche le centre de cette énergie qui m’alimente. Rien ne sert de vouloir tenter d’analyser à perfection cette traversée, qui chaque fois me bouleverse, car à peine ébauchés les mots deviennent des pattes de mouches grossières sur la paroi satinée de son monde.

Lorsque je me suis retrouvée dans cette bibliothèque privée, aux livres gigantesques, aux matières nouées, fusionnelles, composites ; où des livres aux dimensions monumentales donnaient l’envie de faire de notre peau le parchemin de ces feuilles destins, j’ai soudainement eu l’intense désir de me mettre en quête d’un livre à écrire à taille humaine, comme si chaque page était le drapé d’un lit qui accueillerait le corps en son encre.

Prendre la plume à une tout autre échelle. Ecrire sur des pages immenses comme des vagues blanches pour tenter de surfer, comme autrefois, sur ces grands tableaux noirs de l’enfance sur lesquels la craie crissait, dans le silence des peurs, des rêves et de tout ce que la vie en devenir esquissait.

S’emparer de cette plume-là, comme celui qui a osé pour nous la voie. Matières vertigineuses où les plus audacieux traversent à ne plus feindre, sans jamais craindre, afin que l’aube vers sa lumière, maintes fois altérée, retrouve sa véracité.

Face à un tel carnet…J’imagine déjà l’inconfort du corps. Comment se tenir. Oser gravir. Quelle posture prendre pour que la continuité des lettres ne devienne pas une douleur physique qui altèrerait le flux naturel de cette quête du sens où les mots surgissent du néant vers le vivant.

Tout est à revoir dans notre façon d’entrevoir, de percevoir. Voir... Une autre destinée. 

Ces livres gargantuesques sont comme des ailes de plomb dont la légèreté aérienne ne peut que nous conduire à la lisière du réel, aux confins de l’imaginaire. Des seuils où les matières s’enchevêtrent, à nous offrir des mondes aussi familiers qu’étrangers.

Je rêve déjà de ce lit aux pages ouvertes sur lequel je coucherai des mots nouveaux, à faire fi de pareils défis. Un livre à ciel ouvert où l’intérieur de l’être.

 

samedi 5 décembre 2015

Prendre parti - Un acte citoyen

Un acte citoyen
Prendre parti

Celui de la liberté

Celle de dire
Celle d’oser
Celle de cesser de croire

Croyances
À devenir
Un copier-coller
D’un monde barbelé
Sans reflet

Miroir ou masque
Etale
Mer d’huile
Où l’ignorance et la peur
Devenues fer de lance

Où les frontières éthiques
Se franchissent
Sans état d’âme
Dès que l’appât du gain
Ou du pouvoir
Horizons miroitants
 
Alors
En ce contexte régression
Où le Moyen-âge a de beaux jours devant lui
Comme une renaissance des ignorances
 
Se draper de la plus belle des libertés
Celle d’un corps nu et sans idées reçues
Tel un nouveau-né
 
À ne céder la place
À aucun dieu
À aucun dogme
À aucun obscurantisme
Ou totalitarisme
 
Pas la moindre parcelle de peau
Pour leurs remèdes placebos
 
Il est grand temps
D'affirmer haut et fort
Que le pays des droits de l’homme
Doit se réveiller de la torpeur manichéenne
Dans laquelle le Front
 
Cette tumeur doit cesser
D’annexer notre terre liberté
 
Prendre parti
C’est ne pas vouloir croire
Que cette maladie mentalement transmissible
Qu’est la bactérie frontiste
Va altérer nos terres
À faire dire à l’histoire
Il y a quelque chose de pourri au pays des droits de l’homme

 


 

dimanche 29 novembre 2015

Intemporel Yunnan...Vestiges d'un monde (fragments d'un carnet)

 Yuanyang - octobre 2015

Yuanyang - octobre 2015
 
Dongchuan - octobre 2015

Dongchuan - octobre 2015

Dongchuan - octobre 2015

Dongchuan - octobre 2015

Yuanyang - octobre 2015
 
Région de Yuanyang (village Hani) - octobre 2015

Région de Yuanyang (village Hani) - octobre 2015

Région de Dali - (séchage des nouilles) - octobre 2015

 Yuanyang - (fabrication du tofu) - octobre 2015
 
                                          Yuanyang - (fabrication du tofu) - octobre 2015
 
Région de Dali - (séchage des nouilles) - octobre 2015
 
Yuanyang - octobre 2015
 
Région de Yuanyang (village Hani) - octobre 2015

Yuanyang - octobre 2015

samedi 21 novembre 2015

La vieille dame et son déambulateur dans Paris n'a pas peur

17 novembre 2015. Ce soir-là, en rentrant chez moi, je suis arrivée comme à l’accoutumée au Luxembourg, la plaque tournante qui me conduit ou m’éloigne de mon domicile.

Le bus 27 était là, mais je n’ai pas eu envie de courir. J’avais tout mon temps. Ses portes étaient closes, mais il ne partait pas. C’est lorsque j’ai pu voir l’avant du véhicule que j’ai compris.

La petite dame, une vieille dame, d’un courage exceptionnel, que je croise régulièrement sur la ligne, aidée par le chauffeur, montait à son rythme dans le bus avec son inséparable déambulateur.

Le chauffeur asiatique l’aidait avec une gentillesse et une patience d’ange. Grâce à elle, j’ai pu prendre mon bus. J’ai tenu son déambulateur car elle voulait rester debout à l’avant. Je savais qu’elle n’avait que deux stations, puisqu’elle descend toujours à Feuillantines.

Nous avons un peu parlé. Elle s’est mise à plaisanter. Elle a toujours beaucoup d’humour. « Vous tenez mon déambulateur, il veut toujours se sauver. » Elle m’a fait rire. Je lui ai parlé de sa joie, de sa bonne humeur, de son courage. « Il faut bien que je sorte tous les jours pour parler aux gens. Il me faut certes du temps, un temps multiplié, mais on y arrive. » Me dit-elle tout en ajoutant qu’elle faisait souvent le trajet complet de la ligne ou celle du 21 qui converge, juste pour voir Paris. Je lui ai conseillé le 27 dont le trajet me semble bien plus beau car il longe la Seine. Elle m’a dit qu’elle s’en souviendrait.

Juste avant d’arriver à Feuillantines, elle m’a parlé de Neuilly où elle était un jour allée et qui semblait l’avoir impressionnée. Neuilly qu’elle avait trouvé grand, très grand, comme si elle était allée au bout du monde. Mais oui, elle y était allée, avec ce courage qui pousse les êtres vers des limites où leurs forces trouvent toujours le chemin de la vie.

Elle portait un béret de laine bleu clair. Son dos voûté la rapetissait, elle qui déjà n’était pas très grande. Mais son regard, son sourire avaient la puissance des cimes. En descendant du bus, elle dit au chauffeur qu’il y avait encore en ce monde des gens gentils. J’ai posé son déambulateur sur le trottoir dans le sens de la direction qu’elle prenait habituellement. Elle s’y est accrochée. Je lui ai demandé si ça allait. Elle m’a dit oui tout en s’éloignant lentement avec un sourire heureux. Je lui ai souhaité une bonne soirée et je suis remontée dans le bus.

Cette rencontre m’a apportée en ce soir du 17 novembre 2015 une joie extrême.

Il y a tant d’horreurs et de médiocrité en ce monde, que vivre la douceur d’un pareil instant où l’on ne sait rien de plus que quelques gestes et mots partagés, est comme un souffle qui vous redonne la vie.

La joie du vivant malgré les ans. La joie d’être là, de traverser, de contempler, de partager, avec cette pointe d’humour, à plaisanter comme une enfant taquine. Comme cette vieille dame, si conquérante de la vie dont elle triomphe chaque jour, m’a fait du bien. Un bien fou, dans cette période où la mort et la destruction de l’autre ont touché Paris. Ce Paris libre qu’incarne cette femme, qui malgré les circonstances et les événements tragiques du moment, avait la force naturelle d’affronter la vie pour traverser Paris, à ne rien changer à ses habitudes, en dépit de ces monstres qui ont tenté de semer la terreur et de vider les rues de la ville.

Contrairement à des gens bien plus valides, cette vieille dame, que j’aperçois certains soirs quand je rentre du travail, comme si elle aussi avait fini sa journée, fut une force lumineuse qui éclaira ma ville.

dimanche 15 novembre 2015

La liberté - l'essence de la vie

La musique
C'est la vie

Boire un verre
C'est la vie

Partager
C'est la vie

La culture
C'est la vie

Paris
C'est la vie

Parce que la vie
Leur fait si peur
Ils ont semé la terreur
En pantins
Assassins

Goutte à goutte
Le monstre manipule
Ses marionnettes de feu

Feux de paille
Ont tué à leur passage

À en oublier
L’indestructible liberté
Qui dans le cœur des humains

L’essence même de la vie

mercredi 11 novembre 2015

Le philosophe est mort

Immuable
Dans le cœur des survivants
Et de tous les suivants

Libre pensée

À faire fondre les chaînes
Que tisse
Insidieuse
Cette maladie vénéneuse

Le totalitarisme
Aux multiples couleurs

Que devient cette libre pensée
De l’homme qui s’éteint

S’agitent les pantins

Que devient cette libre pensée
De l’homme qui

Un livre à ciel ouvert
Ineffable rai
Où la lumière

Obscurité silencieuse
D’une flûte traversière

Fluidité des mondes
Où l’encre
Laisse entrevoir
Les lueurs endormies

Eveil
Des espaces blancs

dimanche 20 septembre 2015

Eternels Imbéciles ont brûlé son piano

Dans les cendres d’une guerre
On cherche un visage

Sur le chemin de l’exil
On cherche une main

Sur le chemin de la vie
On cherche celui
Sous les pas de qui
La beauté d’un pays

Eternels
Imbéciles
Ont brûlé son piano

Les doigts muets
Aeham Ahmad
A fui sa Syrie

Eternels
Imbéciles
Ont brûlé son piano

Une note de musique
Et ils craquent
Une allumette

Une note de musique
Et ils tremblent
Les armes à la main
Jusqu’au feu éteint

Musiciens du monde
Aiguisez vos partitions
Et jouez à l’unisson

Jouez
Jouez

À faire tomber les armes
De ces Eternels Imbéciles

jeudi 17 septembre 2015

© Richard Peter

Dresde - février 1945

© Bulent Kilic/AFP

Konabé - janvier 2015



Quelle que soit l’histoire
S’efface la mémoire


 Il y eut un matin
Il y eut un soir


 De l’aube au crépuscule
Le cycle des saisons


 Cendres et ruines
À foison


 Sur le chemin des rêves
L’homme se perd


Figure de chair
Figure de pierre


 Contemplation silencieuse
Mémoire fallacieuse

 
Que s’est-il passé
Entre ces deux clichés


mercredi 2 septembre 2015

samedi 29 août 2015

Une fraction de seconde

Des milliers d’yeux
Rivés sur eux

Comme un phare dans le lointain
Eux aussi
Nous observent

Terres de liberté

Mur de glace
L’espoir glisse en masse
Sur les parois érigées

Nous ne faisons que passer
Droit de vivre
Droits de l’homme
Pour tous les humains

Une fraction de seconde
Se glisser furtivement
Dans cette embarcation
Où l’espoir fer de lance
Conduit l’homme vers l’humain

Qui
Pour s’identifier
Derrière son écran
À tous ces errants

S’identifier
La place est déjà prise
Par pléthore de héros

People placebo
Poupées gonflables de l’imaginaire
Robots ou monstres sanguinaires
Egos aux couleurs planétaires
Vacuité d’une célébrité ordinaire
Rêves d’immortalité
Ephémères

Une fraction de seconde
Se mettre à la place
Et tenter de discerner
L’essentiel du futile
Que distillent nos images

De la peur à l’indifférence
L’éveil ou le déclin
D’un monde où les humains

jeudi 6 août 2015

Fragments d'un carnet





 
 
 
 L’ange noir
Cherchera-t-il toujours
Dans l’obscurité nuageuse
De ses ailes poussiéreuses
Cet indicible mouvement
Qui tend vers la lumière
 
 

 
Dresde - Juillet 2015
 
 
                                       

mardi 9 juin 2015

Lorsque la culture vers l'obscur

Il est des temps
Récurrents
Dont nous nous imaginions
Exempts

Des temps
Où l’audace
Perd sa propre trace

Le courage
Perle rare

Libres penseurs
Créateurs
Humanistes
Novateurs

En ces temps où la culture
S’autocensure
Pour ne pas froisser
Obscurantistes
Et autres fascisants
Croissants
Menaçants

Taillez vos crayons
Aiguisez vos plumes
Ne mutilez pas vos films
Trempez vos pinceaux
Dans toutes les peaux

Ne laissez aucun dieu
Vous enterrer vivant

Maintenez en l’état
Les vrais débats

Laissez libre cours
À toutes manifestations artistiques
Sans panique

Ne pas devenir otage
Avant d’avoir été kidnappé

Victime
De l’intolérance
De l’ignorance
Avant d’avoir tout fait

Pour sauver
La liberté
En sa diversité

mardi 26 mai 2015

Apocalypse now ?

Surenchère nucléaire

Les prosélytes fallacieux
Aux cerveaux pileux
N’ont jamais froid aux yeux

Terres entières
Mortifères

Annexion
Destruction
Contamination

Tant de sites à ciel ouvert
Où l’uranium
Sans surveillance

Du Kazakhstan
Au Pakistan
En traversant

Jusqu’à Pelindaba
Sur la terre où Mandela

Pendant que l’Occident
Surveille ses libertés
Et négocie en catimini
Avec les pays
Où l’or noir
Salit les mains de tous ceux
Qui jouent au poker menteur

Les marchands d’uranium
Véhiculent des monticules
À faire pâlir
Les plus grands scénarii

Ne pas compter sur Dieu
Pour arrêter ces fous furieux

À tous ceux qui rêvent
D’un nouveau siècle des lumières

Il est grand temps
Grand temps

vendredi 8 mai 2015

Au pays des droits de l'homme


Pays des droits de l’homme
 
Tais-toi
Tais-toi
 
Ne m’appelle plus
Comme ça
 
Tu exagères
Tu dramatises
 
Non
Le ver est dans le fruit
 
Les populistes prolifèrent
Et dans les hautes sphères
On m’affuble de grandes oreilles
Pour éviter les balles
 
Et pour quelques Rafales
On ferme les yeux
Sur des pays peu envieux
Pour les droits qui me nomment
 
Une envie d’exil
Peut-être l’Antarctique
 
Tu en oublies
Le réchauffement climatique
 
Je ne sais plus
 
Moi non plus
 
Même si
 
Moi aussi

 

vendredi 1 mai 2015

Lettre ouverte à Wim Wenders – « Every thing will be fine »…not so fine !

Cher Monsieur Wenders

Le documentaire vous allait si bien

J’ai pleuré sur « Pina »
Moi la néophyte de la danse

J’ai cessé de respirer
Et contemplé en apnée
Votre traversée salgadienne

Je me faisais une joie de vous retrouver
Même si l’idée de mettre des lunettes 3D
Ne m’enchantait guère

Un retour à la fiction

Je n’ai rien soupçonné
Moi qui vous avais tant aimé
Et qui pourtant avais fini par vous quitter
À force de ne plus vous retrouver

Perdre la trace
Sans doute
Parfois
Salutaire

La grâce de vos documentaires

Me voilà donc installée dans ce grand fauteuil rouge
Chaussée de mes lunettes 3D
Enveloppée dans un soudain fondu au noir
Les yeux rivés sur l’écran lumière

Premiers plans
Un carnet
L’écriture
J’y étais
Je savais
J’avais lu
J’étais préparée
L’accident
L’enfant

Jusque-là on vous suit Monsieur Wenders
On vous suit

Méprise volontaire
Non
L’enfant n’est pas mort
Il tient la main de l’homme qui conduisait
On arrive devant la porte de sa maison
La caméra s’attarde sur un dessin
On commence à comprendre

Charlotte Gainsbourg
Epoustouflante
Du début à la fin

Mais tout cela
En vain

Le film se déroule
Comme une bobine absente
Il manque quelque chose
Pourtant
Tous les ingrédients

Que m’arrive-t-il
Je n’y crois pas
Everything glisse sur moi
Comme du marbre froid

Je tente de revenir
Aux ailes du souvenir
Oui
Tu es bien devant un film de Wim Wenders
Il te parle d’écriture/de souffrance/d’amour/de mort/de la vie des hommes et des femmes/des liens que l’on croit avoir trouvés/qui finissent par nous échapper/de cette présence absente/de cette mort insoutenable qui emporte un enfant

Déroulant de fin
Interminable liste
Les meilleurs vous accompagnent


Je cesse de résister
Non
L’argent ne fait ni le bonheur
Ni le talent

Personne n’y croit
Pas même vous

Vous nous laissez à l’entrée
De quelque chose qui aurait pu

Que vous est-il arrivé Monsieur Wenders
Le documentaire vous allait si bien...si bien