dimanche 2 juin 2013

Où sont passés les penseurs, les passeurs...



Où sont passés les penseurs
Et tous ceux qui faisaient nos grandes heures
 
Dans les librairies
Il y a encore des livres
En ces temps où l’image
 
Images dégoulinantes
Exhibant sans distinction
Le public
Le privé
 
Comme si le monde entier
Dans le même drap vautré
 
Mimétisme des pages
Ressembler à l’image
 
Dans les librairies
Il y a encore des livres
 
On devrait s’en réjouir
 
Où sont passés les passeurs
Autrefois éditeurs
 
Aujourd’hui
La plupart
De simples entrepreneurs
 
Derrière leurs étals
Un à un
Ils déballent
Tout ce que le public
À faire croire qu’il réclame
 
Spéculation
Sur la moindre éjaculation
 
Grandeur nature
Quelques-uns s’encanaillent
Dans le tripot des mots qu’ils impriment
 
À laisser
Une étrange
Et troublante
Impression
 
Et pendant ce temps
Les bus des grandes villes
Portent ostensiblement
Sur leur flanc
Les stigmates du dernier best-seller
 
Mondialisation
Communication
À l’unisson
 
Et le poète à rêver
De la maturité d’un monde
Où les vers
Comme les pensées des philosophes
À leur tour
Un jour
Sur le flanc des bus
À nous dire
Que le monde a changé
Que les cloisons sont tombées
Que la profondeur
N’a jamais eu peur des projecteurs
 
Arrêt sur image
Autrefois
Gutenberg
 
Mémoires anciennes
Où sont passées tes belles traces
En nos jours trash
 
Dans les caniveaux
Le reflet des cigognes
Qui vers leur printemps
 
Sur les trottoirs de la ville
Il y en a tant
Vers d’autres tourments
 
Et le soir dans les salons
À la lumière des télévisions
La tentation de lire
Le goût du jouir
 
S’éteint la vie
 
Où sont passés les éditeurs
Autrefois des passeurs
Où sont passés les penseurs
Qui faisaient nos belles heures
Derrières tous ces leurres
Qui sous les projecteurs